En litige avec une société à qui il loue un local commercial, un bailleur décide d’agir en justice pour obtenir son départ et le remboursement des loyers impayés. Mais la société va expliquer que la demande du bailleur doit être rejetée puisqu’elle n’est, en réalité, pas son locataire. Et à raison semble-t-il…
Conclure avec une société en cours de formation : la vigilance est de rigueur !
Un bailleur met en location son local commercial et signe un contrat de bail avec la dirigeante de la société-locataire qui n’a pas encore été formellement créée. C’est pourquoi la dirigeante déclare, dans le contrat de bail, agir pour le compte de la société en formation.
Quelques années plus tard, la société ne verse plus le loyer dû, que le bailleur réclame, mais en vain. La société explique alors qu’elle n’a jamais souscrit le bail commercial puisqu’elle n’a jamais repris à son compte le bail conclu par la dirigeante.
La société rappelle que pour que le bail commercial lui soit opposable, il faut que l’une 3 formalités suivantes ait été respectée :
- annexer aux statuts de la société un état détaillé et précis indiquant la nature des actes déjà accomplis au nom et pour le compte de la société en formation ;
- faire valider le contrat conclu par les associés ;
- donner mandat à un associé ou à plusieurs d’entre eux les autorisant à prendre des engagements au nom et pour le compte de la société (cette solution ne vaut que pour les actes conclus entre la signature des statuts et l’immatriculation de la société).
Or, la société constate qu’aucune de ces formalités n’a ici été accomplie. Dès lors, elle n’est pas locataire du local commercial et l’action du bailleur à son encontre à ce titre doit être rejetée…
Mais le bailleur considère que le bail a bien été implicitement repris par la société car :
- la dirigeante s’est présentée comme le gérant d’une société en cours de formation ;
- la société a diligenté des actions en justice en se prévalant de la qualité de titulaire du bail ;
- la société s’est toujours présentée au cours des actions en justice comme ayant qualité pour agir en tant que titulaire du bail.
Mais le juge tranche en faveur de la société. Seules les 3 formalités, rappelées par la société, permettent de formaliser la reprise d’un engagement souscrit pour le compte d’une société en cours de formation. La reprise implicite, alléguée par le bailleur, est impossible.
Il faut donc considérer que c’est la dirigeante qui a la qualité de locataire et que c’est contre elle que le bailleur doit agir…
Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 20 février 2019, n° 17-14242
Qui est locataire : la société ou son dirigeant ? © Copyright WebLex – 2019